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« France, is it a good country ? »

 

Olivieer Jobard/MDM/SIPA

Olivieer Jobard/MDM/SIPA

 

De nouvelles têtes, plein de nouvelles têtes. Le centre d’accueil était hier, encore plus que d’habitude, plein à craquer. A peine entrées dans le centre, avec Elisabeth Jonniaux – une réalisatrice qui habite  le quartier et qui m’a contactée suite à l’article de télérama sur mon blog (http://www.telerama.fr/idees/sangatte-existe-toujours-a-paris,38104.php) – nous sommes prises dans le mouvement. Un peu perdues aussi. La plupart des exilés entassés-là, à l’abri de la pluie, nous saluent poliment. Hamid, un exilé que j’ai déjà croisé à plusieurs reprises, nous accoste et de lui-même commence à nous raconter son périple. « Je suis parti il y a quatre déjà de Gazny, au sud de l’Afghanistan. En bus, je suis allé au Pakistan, puis en Iran, de là je suis passé en Turquie, puis en Grèce, en Italie et me voilà à Paris depuis deux mois ». Quel est son but ? Il ne le sait pas encore. « Je voudrais bien demander l’asile en France, mais je ne sais pas comment faire, je cherche encore des documents en persan pour me renseigner… »La conversation se fait en français. Et oui ! depuis quelques temps, il prend des cours quatre fois par semaine dans une association. Son niveau de maîtrise et son vocabulaire sont impressionnants…. 

Des garçons, très jeunes se rapprochent. Hamid en profite pour prendre la tangente. Le plus âgé, 16 ans, sans hésitation, me « saute » dessus et en rafale m’interroge en anglais : « Cela fait deux jours que je suis à Paris. Qu’est-ce que je dois faire pour demander l’asile? A qui dois-je m’adresser, où sont les documents ? » Les questions s’enchaînent, je n’ai pas le temps de lui répondre. Avec Elisabeth, nous lui conseillons de s’adresser au responsable du centre. Mais il s’en fiche, il veut nous parler à nous. Malgré le bourdonnement et le bruit incessant, il nous raconte son histoire. Il arrive de Bologne où il a passé cinq mois (il se débrouille très bien en Italien aussi). « L’Italie, je n’aime pas… bah, il n’y a rien à faire là-bas, pas de travail, rien … » Avec des yeux pétillants, presque rieurs, il me fixe et m’interroge à nouveau.  » J’ai laissé mes empreintes un peu partout, en Grèce, en Italie, même en France, les policiers me les ont prises à Nice… Tu crois que je peux quand même demander l’asile ici ? »

Deux jours à Paris et déjà il a capté les quelques repères nécessaires à sa survie. Hier, il a dormi au « camp », le centre d’accueil d’hébergement d’urgence normalement réservé aux adultes « errants » (il a sûrement réussi à se faire passer pour majeur) dont les bus partent de la Place du Colonel Fabien. Ces copains, beaucoup plus jeunes, n’ont eu droit qu’au jardin Villemin. Le plus jeune de la troupe, 13 ans, avec sa frimousse de gamin et son bonnet vissé sur la tête, me dévisage un moment puis finit par me tirer par la manche. Il se campe devant moi, plante ses yeux dans les miens et avec une intensité de naufragé me demande : « France, is it a good country? » 

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